J’ai longtemps hésité à rédiger un article sur le Tongariro Alpine Crossing. Ne vous méprenez pas, il s’agit de l’une des plus belles randonnées d’une journée que j’ai eu l’occasion de parcourir.
Pourquoi ai-je donc autant hésité à parler du Tongariro Alpine Crossing?
J’ai hésité à parler de la randonnée sur le Tongariro Alpine Crossing en raison des nombreux malaises que j’avais par rapport à celle-ci, confirmés lors de mon passage sur le sentier :
- Le nombre élevé de touristes, parfois plus de 2 000 en une journée (notez que je parle volontairement de touristes plutôt que de randonneurs) ;
- Leur méconnaissance ou « je-m’en-foutisme » des concepts du Sans trace ;
- Les dangers encourus par ceux qui sont mal équipés en dehors de la saison estivale, mais également lors des intempéries ;
- Leur non-respect de la culture maorie.
Depuis 2010-2011, le Tongariro Alpine Crossing a connu une explosion touristique, passant de 77 000 « randonneurs » à 141 000 en 2016-2017. La période la plus achalandée va de la fin octobre à la fin avril, la saison estivale étant de décembre à février dans l’hémisphère sud.
Personnellement, je m’y suis rendu au mois de novembre, quelques jours après le début des restrictions de stationnement, annonçant le début de la période d’achalandage. Je croyais savoir à quoi m’attendre, mais j’ai été abasourdie par les autobus qui allaient et venaient, laissant s’écouler des tas de touristes se répandant ensuite sur le Tongariro Alpine Crossing. Tout au long de la journée, j’ai été entourée par une horde de voyageurs, montant le Devil’s Staircase à la « queue leu leu », attendant à la « file indienne » pour prendre cette photo inévitablement gâchée par toutes ces minuscules personnes au loin.
J’avais hâte de retrouver le calme et la solitude à la fin de la journée. Le sentier, lui, ne pouvait malheureusement pas y échapper. Le lendemain et le surlendemain, plusieurs centaines de touristes allaient à nouveau le piétiner sans remord. Ils allaient à nouveau s’aventurer sur ses flancs pour éviter de faire la file ou pour prendre une photo instagrammable. Certains se permettront même d’y laisser des déchets tels des cœurs de pommes, des pelures de banane ou l’emballage de leur barre de céréales.
QUELS SONT LES PROBLÈMES ENVIRONNEMENTAUX SUR LE TONGARIRO ALPINE CROSSING
Imaginez que, sur un tronçon de 500 mètres, cette horde de touristes contourne pendant un mois le sentier officiel pour éviter de faire la file ou pour prendre la photo du siècle. C’est tout de même près de 15 000 personnes (et je suis conservatrice) qui endommageront les sols environnants, créant par le fait même des sentiers secondaires ici et là qui seront à leur tour empruntés par les hordes futures. L’un des principes de base de la randonnée, c’est de demeurer dans les sentiers établis puisqu’ils ont été créés à des endroits précis afin de protéger l’environnement. L’achalandage élevé de la randonnée du Tongariro Alpine Crossing permet de bien comprendre les conséquences négatives de ces comportements.
En ce qui concerne les déchets, je n’ai sûrement pas besoin (du moins je l’espère) de vous expliquer pourquoi vous ne devriez pas les jeter par terre. Par contre, je suis convaincue que plusieurs d’entre vous se débarrassent parfois de leurs pelures de banane ou cœurs de pomme en les « remettant » dans la nature. Je vais peut-être vous étonner, mais on ne devrait jamais prendre cette habitude. Sur le Tongariro Alpine crossing, il n’y a pas d’arbres et peu de végétation. C’est un terrain volcanique. Un cœur de pommes ou tout autre déchet organique y ont encore moins leur place. Pourtant, ce n’est pas rare d’en voir joncher le sol. Reprenons la même image que tout à l’heure. Imaginez que les 15 000 touristes laissent un cœur de pommes sur le sentier. Cela représente des milliers de cœurs de pomme après un mois seulement.
Voici un article que j’ai rédigé pour le magazine Espaces sur 4 choses à ne pas faire en randonnée pour réduire son empreinte écologique.
QU’EN EST-IL DES DANGERS ASSOCIÉS AU TONGARIRO ALPINE CROSSING?
Souvent appelé Tongariro Crossing, j’ai choisi d’utiliser son nom complet, qui inclut normalement le terme Alpine. Ce choix de mots indique la difficulté et la technicité de la randonnée. Toutefois, elle est considérée comme une simple attraction touristique et plusieurs s’y aventurent sans l’équipement nécessaire en dehors de la période d’achalandage. En plus de nécessiter des vêtements adéquats selon la météo changeante, le Tongariro Alpine Crossing requière des crampons, un piolet et des connaissances de la randonnée alpine si on veut s’y aventurer en dehors de la saison touristique.
Selon un rapport du Mountain Safety Council (2018), près de 10 % des opérations de secours sur le territoire de la Nouvelle-Zélande entre 2010 et 2017 ont été sur le Tongariro Alpine Crossing. Bien que le rapport ne fasse mention d’aucun décès, 3 individus sont décédés en randonnée sur le Tongariro Alpine Crossing en 2018, dont 2 accidentels et un de cause médicale.
LA CULTURE MAORI DANS TOUT CELA ?
L’ensemble des cours d’eau sur le Tongariro Alpine Crossing ainsi que les sommets des monts Ruapehu et Ngauruhoe sont considérés sacrés par les Maoris. Dans ce contexte, il est demandé aux touristes d’éviter de monter sur ces sommets et de toucher aux cours d’eau. Malheureusement, ces demandes ne sont pas respectées. Grimper au sommet
du mont Ngauruhoe est extrêmement populaire auprès des fans du seigneur des anneaux puisqu’il représente la fameuse Montagne du Destin, où a été forgé l’anneau, dans la trilogie de Peter Jackson. Sachez toutefois qu’on n’aperçoit jamais le sommet dans la trilogie par respect pour la culture maori. Pourquoi ne pas suivre les traces de Peter Jackson ?
QUELS SONT LES COMPORTEMENTS À ADOTER LORS D’UNE RANDONNÉE SUR LE TONGARIRO ALPINE CROSSING?
- Ne jetez aucun déchet sur le sentier. En anglais, l’expression « Pack it in, pack it out » est utilisée. Tout ce que tu amènes sur le sentier, tu dois le rapporter avec toi ;
- Demeurez toujours sur le sentier et évitez de vous aventurer en dehors de celui-ci ;
- Malgré la tentation, ne tentez pas l’ascension du mont Ngauruhoe même si d’autres touristes le font ;
- Évitez de toucher aux cours d’eau ;
- Si possible, choisissez de faire la randonnée en hiver avec un guide. Vous réduirez votre impact sur le terrain en marchant sur la neige et vous diminuerez l’achalandage touristique pendant l’été. Les paysages sont également à couper le souffle durant cette période.
- Vérifiez la météo et vérifiez les conditions du sentier auprès du DOC avant de vous y aventurer surtout au printemps, à l’automne et en hiver ;
- Vérifiez que vous avez l’équipement nécessaire en fonction de la saison ;
- Ne sous-estimez pas une randonnée en milieu alpin, renseignez-vous.